La crise du COVID-19 a des impacts majeurs sur l’e-commerce. Mais ces impacts sont-ils identiques dans tous les pays ? Ces tendances perdureront-elles au-delà de la période de confinement ? L’analyse de différentes enquêtes permet de comprendre les principales tendances.

En France et dans de nombreux pays du monde, sous l’emprise du COVID-19, l’activité commerciale est réduite aux secteurs essentiels. Soumis à des restrictions de déplacements, les consommateurs se rabattent sur l’e-commerce pour s’alimenter et se divertir pendant cette période.

La FEVAD a publié les résultats d’une enquête effectuée auprès de 136 sites e-commerce français entre le 23 et le 25 Mars 2020 afin de cerner l’impact du Covid-19 sur l’e-commerce. 94% des répondants ont indiqué que leurs sites étaient toujours ouverts, bien qu’un tiers fonctionne en activité réduite. Sans surprise, les secteurs les plus touchés sont la mode et l’équipement de la maison, tandis que les secteurs de l’alimentaire, de la téléphonie-informatique et des biens culturels sont en hausse. Au total, 76% des sites analysés ont observé un recul des ventes depuis la mi-mars. La pérennité des entreprises est alors mise à rude épreuve : près de 40% des entreprises répondantes estiment qu’elles ne résisteront pas au-delà de 3 mois de confinement et 20% ne se sont pas prononcées.

Une analyse réalisée par ContentSquare sur plus d’1,5 milliards de sessions a permis de comparer les données de 800 sites entre le 6 janvier et le 16 février par rapport à la 1ère semaine de confinement en France. Ce baromètre indique que le trafic global a bondi de 13%. La grande distribution et la pharmacie/parapharmacie ont vu leur trafic se multiplier par environ 2,5. A l’inverse, les secteurs du voyage et du luxe ont connu une chute considérable, avec une baisse des taux de conversion (c’est-à-dire la capacité d’un site e-commerce à transformer ses visiteurs en acheteurs) respectivement de 42% et de 24%. Tous secteurs confondus, le taux de conversion a baissé de 4% entre les deux périodes comparées.[1]

Le data analyste Foxintelligence a publié un baromètre qui confirme et développe les observations ci-dessus en France. Le nombre de commandes e-commerce alimentaire a presque doublé entre la semaine du 2 mars et celle du 16 mars. Le chiffre d’affaires global du e-commerce non alimentaire est quant à lui stable dans sa globalité, malgré de grandes différences sectorielles. Ainsi, le secteur du sport et notamment du fitness a affiché une nette progression, avec pour certains articles un facteur supérieur à 8 en volume. 

A l’échelle Européenne, Ecommerce Europe a comparé les impacts suivant les pays dans une enquête menée auprès de 15 associations membres. L’enquête soulève qu’une pression est exercée sur les opérateurs de livraison. Ainsi, 60% des répondants ont observé un petit impact sur la livraison de leurs colis, tandis que 33% ont subi un fort impact négatif. Seules l’Autriche, la Belgique et l’Espagne observent une augmentation des ventes en ligne de produits non alimentaires, quand les autres pays constatent globalement une baisse.

D’autre part, 64% des répondants ont indiqué que les magasins physiques qui ne sont pas autorisés à ouvrir proposent des options alternatives de livraison à leurs clients. Dans 78% des cas, ces magasins physiques proposent de la vente en ligne.

Plus que jamais, cette crise inédite met en exergue l’importance pour un commerçant physique de disposer d’un site internet et de solutions de livraison à domicile.

Comscore a publié une analyse sur les comportements des e-consommateurs pendant la crise du COVID-19 en France, Allemagne, Italie, Espagne et au Royaume-Uni. Cette analyse montre que les sites et applications de billetterie figurent logiquement parmi les plus touchés, avec un recul de la fréquentation d’environ 50%.  L’évolution de la fréquentation des sites e-commerce de produits alimentaires n’est pas homogène selon les pays. Ainsi, entre la 3ème semaine de février et la deuxième semaine de mars, la visite de ces sites n’a augmenté que de 1% en France, contre 20% en Allemagne, 39% en Italie et 13% au UK. Cette hétérogénéité pourrait s’expliquer par le décalage des périodes de confinement suivant les pays.

Ces différentes études montrent des évolutions différentes concernant l’e-commerce alimentaire, les périodes d’enquête n’étant pas tout à fait identiques. Il semble que l’e-commerce alimentaire ait progressé de façon considérable entre la 2ème et la 3ème semaine de mars.

Il est intéressant de constater que les impacts ne sont nécessairement identiques en Chine. Durant la période de quarantaine, le secteur de la mode en ligne a chuté quand d’autres sont restés stables, comme la cosmétique. Lancôme a par exemple étonnamment généré un chiffre d’affaires sur les mois de janvier et février supérieur à la normale. Comme en France et en Europe, le secteur du voyage a été le plus touché tandis que l’alimentaire a affiché les meilleurs résultats. Depuis mi-février – début mars, les consommateurs chinois semblent plus optimistes par rapport au mois précédent, et l’ensemble des secteurs semble rebondir.[2] Le pure player JD.com prévoit une augmentation de 10% de son chiffre d’affaires sur le premier trimestre 2020, malgré l’épidémie.

Quels seront les effets de cette pandémie sur l’e-commerce en France ? Même s’il est encore trop tôt pour analyser l’ensemble des impacts que cette crise aura sur le commerce en général, nous pouvons imaginer quelques conséquences.

Tout d’abord, plus que jamais, l’e-commerce et les services de livraison qui en découlent seront des compléments indispensables au commerce physique.

Très vraisemblablement, la croissance du e-commerce perdurera, peut-être même à un rythme accéléré.

La livraison à domicile, comme les drives, intensément utilisés durant cette période par de nombreux consommateurs, continueront à adapter et développer leurs services.

L’allongement assez compréhensible des délais dans cette période de tension extrême mettra peut-être au second plan la vitesse. Le service, la ponctualité, mais aussi le respect des engagements, prendront probablement le dessus sur la rapidité qui est, sauf dans des situations d’urgence, un élément qui apparaîtra au second plan.

Cette situation a toutefois comme côté positif la mise en lumière de l’aspect vital des services logistiques et de livraison, qui participent au fonctionnement de l’économie, de l’approvisionnement et de la consommation.


[1] https://contentsquare.com/fr/blog/news/ecommerce-coronavirus-barometre-semaine-12/

[2] https://walkthechat.com/is-chinas-e-commerce-industry-already-bouncing-back-after-coronavirus-epidemic/