Publié en octobre dernier, le rapport de la mission Logistique Urbaine Durable (LUD) appelle à la collaboration des collectivités avec les transporteurs et chargeurs. De nombreux leviers comme l’open data, le foncier logistique urbain ou encore la multimodalité y sont explorés.

La mission LUD pour « Logistique Urbaine Durable » a été initiée de janvier à juin 2021 par la Direction Générale des Entreprises, le Ministère de la transition écologique et la Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer dans le cadre du Comité interministériel de la Logistique (CILOG). Jean-Jacques Bolzan, Anne-Marie Idrac et Anne-Marie Jean ont été missionnés pour ce rapport.

Le document s’articule autour de 8 familles de propositions dans lesquelles les collectivités locales jouent un rôle central. Voici quelques propositions présentées dans le rapport pour déployer une « logistique urbaine efficace, respectueuse de l’environnement et durable sur nos territoires ».

Ouverture des données et sensibilisation

Le rapport soulève l’enjeu essentiel de la mise à disposition des données auprès des acteurs économiques. Les données relatives aux flux permettent, en les exploitant, d’améliorer l’efficience de la livraison du dernier kilomètre tout en réduisant son impact environnemental. La collecte des données statiques est également importante, par exemple concernant les aires de livraison ou la réglementation locale. Le projet BAC IDF, qui ambitionne de collecter l’ensemble des réglementations des communes franciliennes relatives aux livraisons urbaines pour les rendre accessibles aux acteurs économiques, ainsi que l’initiative de la région PACA[1], répondent à ces attentes. Les collectivités peuvent également cartographier les aires de livraison pour aider les livreurs à se stationner en toute sécurité pendant les opérations de chargement et de déchargement.

Toutefois, l’implication des collectivités au partage de leurs données sera conditionnée par leur sensibilisation à ces sujets. Le rapport propose la mise en place de MOOC adaptés aux besoins des collectivités pour mieux intégrer la logistique urbaine dans leurs politiques publiques. Ces supports seraient complémentaires aux fiches ADEME existantes et au programme InterLUD.

Les auteurs de ce rapport préconisent de mettre en place un observatoire national de la logistique urbaine, qui serait un tiers neutre auquel les collectivités pourraient communiquer leurs données en pleine confiance. Les observatoires régionaux des transports (ORT) et le GART ont été, entre autres, identifiés comme de potentiels candidats.

Il s’agit également de sensibiliser les consommateurs aux impacts des modes de livraison de colis, notamment grâce à « un label rendant visible l’impact environnemental de la livraison à destination des consommateurs, particuliers ou entreprises. »[2] Un tel label indiquerait au consommateur l’impact environnemental de sa livraison. Dans un premier temps basé sur le type de motorisation et les bonnes pratiques en matière de livraison, le calcul des émissions pourrait être étendu au type de véhicule précis utilisé, au taux de remplissage et au trajet effectué.

Un accent porté sur le foncier logistique

Les espaces logistiques se sont progressivement éloignés des pôles de consommation, augmentant la distance parcourue entre les entrepôts et les points de livraison.

Pour y pallier, les collectivités peuvent s’emparer d’outils d’aménagement existants améliorant l’efficience de la logistique du dernier kilomètre en préservant dans le PLU(i) ou en développant du foncier logistique dans les secteurs nécessaires. Certaines villes, comme Paris, Nice et Barcelone, ont établi des ratios d’espaces logistiques pour tout nouvel établissement commercial dépassant une certaine surface. Le rapport préconise d’expérimenter ces ratios au travers des PLU(i) « pour la production de logements et de bureaux », qui sont également générateurs de flux. La poursuite de concertations entre professionnels et collectivités est également recommandée pour construire des espaces logistiques en ville. A l’échelle nationale, la mission propose d’explorer la mixité des usages dans un même bâtiment, d’étudier la possibilité de construire en hauteur ou en sous-sol et d’assouplir les règles relatives à l’installation de bornes de recharges électriques en sous-sol. Quant à l’échelle locale, le rapport propose d’« harmoniser les procédures d’instruction des dossiers de construction d’entrepôts urbains », d’utiliser les friches qui sont généralement des espaces urbains sous-utilisés et de favoriser l’expérimentation de micro-hubs pour la logistique du dernier kilomètre en modes doux.

A l’échelle régionale, il est également recommandé de renforcer la place de la logistique dans les SRADDET, et ce dans le but de les structurer et de les harmoniser. Cette démarche permettrait de « cartographier précisément les besoins et d’organiser la planification. »

Pour des flux optimisés et décarbonés

De nombreux leviers complémentaires concernant directement les acteurs de la livraison sont étudiés dans le rapport LUD.

La mutualisation et la massification constituent le principal moyen de verdir la logistique urbaine. Alors que le camion est le premier acteur de massification en ville, le train et le transport fluvial peinent à émerger. « Pourtant, selon VNF, le fluvial émet 5 fois moins que le routier par tonne-kilomètre et le fret ferroviaire 9 fois moins d’après 4F ». L’expérimentation citée d’ULS à Strasbourg, qui achemine des colis dans le centre-ville et dont le relais est assuré par des vélocargos pour le dernier kilomètre, montre que le transport fluvial est tout à fait réaliste et pertinent en zone urbaine dense.

Favoriser la livraison en hubs plutôt qu’à domicile et réduire la part de vide dans les colis font également partie des pistes d’optimisation. D’autre part, le rapport pointe les retours à vide qui constituent des pertes opérationnelles, économiques, écologiques, ainsi qu’en termes d’emprise sur l’espace public. La récupération de déchets propres par les transporteurs pourrait les aider à optimiser leurs flux retour.

Enfin, le rapport pose l’enjeu du renouvellement des flottes de véhicules aux motorisations alternatives, freiné par les faibles autonomies et le maillage insuffisant de stations de recharge. L’accompagnement financier des acteurs de la livraison, facilité par une centralisation nationale des aides, reste un enjeu clé. Il est proposé de mettre en place « un guichet unique pour centraliser toutes les procédures, informant et formant par la même occasion aux aides et bonnes pratiques. »

Sans surprise, la collaboration entre collectivités, transporteurs et chargeurs est indispensable pour développer la livraison écologique. Le rapport LUD dresse un panel de solutions à la portée de tous les acteurs et leur mise en application contribuera au déploiement de la logistique urbaine durable.

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[1] http://schema.data.gouv.fr/CEREMA/schema-arrete-circulation-marchandises/

[2] P. 51 : https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/282046.pdf