L’augmentation du coût de l’énergie et l’inflation impactent les pratiques des consommateurs pour effectuer leurs achats, mais aussi les transporteurs. Quelles sont les conséquences et les opportunités de cette situation nouvelle ?

Inflation, protection du pouvoir d’achat, coût de l’énergie… La rentrée 2022 s’annonce sous le signe de la sobriété mais aussi d’une certaine inquiétude face aux incertitudes économiques.

La livraison du dernier kilomètre touche directement la consommation car elle constitue le vecteur d’atteinte des clients, soit directement au travers du e-commerce, soit indirectement en livrant les magasins.

Se faire livrer ou faire ses achats en voiture 

La majorité des consommateurs, à l’exception de ceux qui habitent dans les centres villes des grandes agglomérations, font leurs achats en utilisant leur voiture individuelle. C’est là le modèle qui fonctionne depuis des décennies. Mais ces achats en voiture représentent un coût, surtout si le lieu d’habitat est éloigné des magasins physiques et des zones commerciales. Ce coût, pendant longtemps, a été intégré dans le budget des ménages avec une certaine opacité. Mais le prix élevé du carburant, ou ses évolutions erratiques, incitent les ménages à être plus attentifs aux déplacements. Lorsque le prix du carburant était supérieur à 2 € par litre, les témoignages de consommateurs attentifs à leurs déplacements notamment le week-end étaient nombreux. On peut imaginer que ces tendances perdurent dans un contexte d’inflation et de contraction du pouvoir d’achat des ménages. Alors, faire le choix d’acheter sur internet et de se faire livrer à domicile constitue dans de nombreux cas un choix de sobriété. Certes, la livraison a un coût, mais bien souvent inférieur à celui de l’utilisation d’une voiture particulière.

Quelles sont les tendances du e-commerce ?

Le e-commerce a connu depuis plus de 10 ans une croissance continue. En 2020, le rythme de cette croissance s’est considérablement accentué, atteignant sur une seule année 32%[1]. Assez logiquement, la progression a été moindre en 2021, affichant toutefois un niveau de 7%. Qu’en sera-t-il en 2022 ? Les chiffres du premier trimestre montrent un tassement des ventes. Mais ce tassement est-il pérenne ? Le e-commerce est souvent assimilé à la recherche de produits à prix attractifs. C’est d’ailleurs dans de nombreuses études le premier critère des consommateurs afin de se tourner vers ce mode de vente. Cette recherche du meilleur prix prend toute son importance dans un contexte d’inflation et d’actions individuelles pour le maintien du pouvoir d’achat. Les chiffres du 2ème trimestre 2022 seront alors scrutés avec une grande attention.

Et si la livraison avait un prix ?

Le coût de l’énergie concerne aussi tous les segments du transport, et notamment la livraison du dernier kilomètre. Les choix de transition énergétique, souvent sans alternative, comme le GNV[2], sont fortement impactés par la crise actuelle. Le GNV, énergie utilisée par de nombreux véhicules de livraison urbaine, comme alternative au diesel, est majoritairement issu de gaz fossile importé. Les filières de biogaz produites en France, même si elles sont en progression, ne participent qu’à une part minoritaire de la consommation[3]. Le coût du GNC (gaz naturel comprimé) utilisé pour le dernier kilomètre se situe en juin 2022 à l’indice 235 (base 100 en août 2019)[4] affichant ainsi une augmentation inédite.

Cette augmentation du coût de l’énergie s’ajoute aux augmentations automatiques du SMIC en 2022 à des niveaux sans précédent et aux autres évolutions de coût supportés par les transporteurs comme la maintenance des véhicules.

L’inflation et l’augmentation du coût de l’énergie, ne sont jamais des bonnes nouvelles. Elles touchent aux équilibres économiques des ménages et des entreprises, notamment des transporteurs dont les marges sont particulièrement faibles.

En impactant les prix du transport, les charges des distributeurs et des e-marchands, surtout ceux qui ont fait le choix de proposer une livraison « gratuite » ou « offerte », sont directement concernées. Ce modèle commercial atteint vraisemblablement ses limites. Certains e-marchands ou commerçants font le choix d’augmenter les coûts des abonnements annuels ou de faire payer une partie du transport retour, comme l’ont récemment annoncé Zara ou H&M.

A l’heure du e-commerce et des livraisons à domicile, l’interaction entre le transport et la consommation est une réalité. Les périodes d’inflation, parfois oubliées, sont aussi des étapes de remise en cause de certaines pratiques. La livraison du dernier kilomètre a alors un rôle à jouer comme variable d’équilibre.


[1] Progression de la vente de biens physiques sur internet en 2020 – source Fevad

[2] Gaz Naturel pour Véhicules

[3] L’objectif actuel est de produire par les filières de biogaz 10% de la consommation de gaz en 2030

[4] Source indices CNR (régional – GNC)