L’e-commerce, tiré par le contexte sanitaire, suit l’évolution des modes de consommation et transforme les villes. Les commerces de proximité peuvent tirer leur épingle du jeu grâce à une stratégie omnicanale et une logistique du dernier kilomètre décarbonée.

La France est le deuxième marché en Europe pour l’e-commerce, derrière le Royaume-Uni. Selon le rapport d’activité 2021 de la FEVAD, ce sont 41,6 millions de français qui achètent en ligne, soit 81,4% des internautes. Le commerce en ligne de produits et de services a atteint 112 milliards d’euros en 2020, soit une hausse de 8,5 % par rapport à 2019. Cette croissance modérée masque l’explosion du e-commerce de produits physiques, qui a connu une croissance de 32% en 2020. Il représentait 9,9 % du commerce de détail en 2019 : cette part a bondi à 13,4 % aujourd’hui. Cette hausse n’est pas sans conséquence pour la logistique urbaine.

Durant l’année 2020, et en particulier pendant les périodes de confinement, les chaînes d’approvisionnement de  certaines entreprises ont connu des perturbations et une réorganisation de leurs supply chains pour les rendre plus résilientes. C’est par exemple le cas de la Camif qui propose désormais 78% de ses produits fabriqués en France, le reste étant fabriqué en Union européenne.  Au global, le contexte de pandémie se traduit par un regain d’intérêt pour les circuits-courts.

La logistique e-commerce, un critère de satisfaction client différenciant

La récente enquête sur les attentes des consommateurs en termes d’e-commerce menée par l’IFOP et Star Service, détaillée dans un précédent article, nous rappelle que la livraison constitue un axe majeur de différenciation et de fidélisation. Ainsi, 64% des répondants estiment que la livraison est un critère primordial, au-delà du prix ou du produit en lui-même. Les personnes interrogées préfèrent également la livraison sur rendez-vous (86%) à la livraison express dans l’heure (54%). 58% d’entre elles seraient prêtes à payer plus cher si elles peuvent choisir l’heure du rendez-vous.  81 % des répondants ont indiqué changer de site e-commerce lorsque les options de livraison souhaitées ne sont pas proposées.

Le caractère vertueux de la livraison apparaît également comme un critère important pour 80% des répondants, qui seraient prêts à accepter un délai de livraison plus long pour réduire l’empreinte carbone de leur livraison de colis.

Pourtant la livraison à domicile est le mode de livraison le plus utilisé, dans 86 % des cas, et 20% des e-acheteurs ont utilisé au moins un service de livraison express au cours des 3 derniers mois.[1] Or ces choix comptent parmi les modes de livraison les plus polluants.

L’e-commerce transforme les villes

Les nouveaux modes de consommation nécessitent de réintégrer la logistique en zone urbaine dense. Ainsi, les réseaux de consignes automatiques se multiplient et les entrepôts de proximité assurent des livraisons en un délai réduit. Pour répondre au besoin en foncier, les délaissés urbains se transforment en espaces logistiques, au départ desquels la livraison écologique peut s’opérer.

Alors que ces transformations sont en grande partie tirées par des multinationales ou des startups alimentées par des levées de fonds, qu’en est-il des commerces de proximité ?

Selon l’économiste Yves Perez, les taux de vacance commerciale ont augmenté de 60% depuis 2015 et les enseignes de mode ont été les plus touchées.[2] Pourtant, la digitalisation des commerces de proximité peut être un vecteur de performance : 52% des commerces indépendants qui vendent en ligne connaissent une croissance d’activité, contre 39 % pour les commerces qui ne vendent qu’en magasin.[3] L’omnicanalité devient alors une opportunité pour le commerce physique en élargissant sa zone de chalandise et en soignant sa visibilité. La digitalisation des commerces de proximité répond également mieux aux attentes des consommateurs (68% des e-acheteurs considèrent qu’ils devraient proposer ce service1), que ce soit au travers d’un site internet unique ou d’une présence sur une market place.

Mais cette évolution digitale transforme également le commerce, qui devient progressivement un espace logistique pour le retrait de commandes en click & collect et comme point de départ pour la livraison à domicile dans un périmètre proche. La pertinence de la livraison à domicile est toutefois conditionnée par un cadre social vertueux des livreurs et par l’utilisation de modes de livraison peu impactants sur le plan environnemental.

La digitalisation du commerce constitue un nouveau métier et les commerces de proximité, notamment indépendants, ont besoin d’acquérir et de développer ces compétences. Les collectivités peuvent contribuer à dynamiser leurs centres-villes en les accompagnant à cette transformation et en encourageant les initiatives de logistique e-commerce décarbonée.


[1] Source : Chiffres clés e-commerce – Fédération e-commerce et vente à distance 2021

[2] https://rcf.fr/culture-et-societe/loeil-de-lexpert-0?episode=75761

[3] Étude d’impact économique et environnemental, Oliver Wyman, 2021, enquête réalisée en décembre 2020 auprès d’un échantillon de 800 magasins en France et en Allemagne