La part croissante du e-commerce dans la consommation et l’intérêt des acteurs publics autour des pratiques de livraison incite les e-marchands et les transporteurs à développer des pratiques vertueuses. Faisons le point sur les dernières tendances.

L’année 2020, avec ses restrictions sanitaires et administratives, a eu pour effet une croissance sans précédent du e-commerce. La vente de produits physiques sur internet a fait un bond de 32% en un an. Nombre d’observateurs s’attendaient à un tassement de la croissance de ce secteur en 2021. Pourtant, l’e-commerce a continué à croître, certes avec un rythme légèrement plus mesuré que lors des années précédant la crise sanitaire. Si l’on s’en tient aux chiffres publiés par la FEVAD[1], les ventes de produits sur internet ont connu en 2021 une croissance de 7%. L’e-commerce représente ainsi 14,1% du commerce de détail.

Plus d’1 milliard de colis livrés

Si la part de la consommation effectuée sur internet reste relativement mesurée, l’impact sur les livraisons urbaines est tout autre. Le nombre de colis livrés annuellement varie suivant les études ; toutefois, nous estimons qu’il a dépassé en 2021 le milliard de colis et sera en 2022 plus proche de 1,3 milliard.[2] Ces colis sont majoritairement livrés à domicile et ont alors pour conséquence le déplacement d’un véhicule de livraison et un arrêt devant le point de destination. Faute d’aire de livraison devant chaque immeuble d’habitation, ces arrêts sont souvent effectués en double-file. L’e-commerce a aussi comme conséquences des présentations multiples liées à l’absence du destinataire et des taux de retours dans certains secteurs tels que l’habillement et la chaussure.

Un des impacts du e-commerce est l’occupation de l’espace public pour la circulation des véhicules et leur stationnement durant le dépôt du colis au destinataire. L’e-commerce, par la fragmentation des livraisons, contribue ainsi à la congestion urbaine. Il participe aussi à la pollution locale et aux émissions de Gaz à Effet de Serre. L’e-commerce génère une surconsommation d’emballages qui se retrouvent dans la chaîne de collecte et de traitement des déchets. Un autre facteur trop peu mesuré est l’augmentation du volume transporté du fait de l’emballage et du suremballage. Trop de colis sont surdimensionnés du fait d’une inefficience de la chaîne de conditionnement.

Cette évolution inéluctable et rapide de la consommation a donc des effets sur l’environnement même si, dans certains cas, l’e-commerce évite à un consommateur de prendre sa voiture individuelle.

Une prise de conscience croissante des acteurs du secteur

Jusqu’à tout récemment, les principaux efforts pour réduire l’impact environnemental du e-commerce provenaient des acteurs de la livraison. La livraison écologique, surtout dans les cœurs de villes des grandes métropoles, a commencé à se développer, avec des véhicules électriques, des biporteurs et des cargocycles. Pour les e-commerçants, le transport décarboné et le respect des contraintes réglementaires croissantes dans les grandes villes étaient en premier lieu une préoccupation des acteurs du dernier kilomètre à qui ils confient leurs livraisons.

Mais en 2021, une évolution majeure est apparue avec la première charte d’engagement des acteurs du e-commerce pour la réduction de l’impact environnemental, dont il a été question dans un précédent article (la charte e-commerce : vers un  dernier kilomètre plus durable). 14 acteurs du e-commerce ont pris l’initiative de signer cette première charte. Même si certains acteurs importants comme Sarenza, Veepee ou Cdiscount apparaissent dans cette première liste de signataires, les 14 entreprises ne peuvent à elles-seules représenter tout le secteur. Très récemment, 18 nouvelles entreprises se sont engagées dans le cadre de cette charte. C’est ainsi le cas de Leroy Merlin, Boulanger, Manutan, Damart ou E.Leclerc. Cet élargissement du nombre d’acteurs signataires témoigne d’une préoccupation croissante. Certains autres acteurs comme Amazon ont fait le choix de s’impliquer différemment au travers d’engagements signés au plan mondial. En 2019, Amazon a cofondé et signé The Climate Pledge. Cette charte comprend différents objectifs notamment celui d’atteindre zéro émission nette sur 50% des livraisons effectuées d’ici 2030. Cet engagement se traduit déjà par des efforts sur les emballages, les bâtiments et le transport. A Paris, les livraisons Amazon sont majoritairement effectuées avec des moyens décarbonés, en véhicules électriques, en vélocargos ou de plus en plus fréquemment à pied. Les livreurs à pied sont réapprovisionnés au départ de camions qui servent de dépôt temporaire local.

Le consommateur devient acteur

Si les transporteurs et les e-marchands deviennent progressivement des acteurs engagés dans la transformation durable du e-commerce, les plus concernés par ces évolutions restent les clients, les consommateurs. Les démarches pour sensibiliser le consommateur sont de plus en plus fréquentes. La charte d’engagement pour un e-commerce responsable citée ci-dessus prévoit que ses signataires, dès le 1er janvier 2023, proposent au consommateur plusieurs modalités de livraison en indiquant le choix qui a le plus faible impact environnemental. Nul doute que cette obligation, certes volontaire, sera un facteur de développement des solutions de livraison urbaine décarbonée. Le baromètre réalisé en septembre 2021 par IFOP et le groupe Star Service montrait que 70% des e-consommateurs auraient une meilleure image de leur e-commerçant si une option de livraison éco-responsable leur était proposée.

L’écosystème autour de livraisons urbaines durables pour l’e-commerce se met ainsi progressivement en place.


[1] Fédération du e-commerce et de la vente à distance

[2] L’ARCEP indique un chiffre total de colis en 2020 de 1,36 milliard, qui comprend l’e-commerce mais aussi les autres origines.